La famille

À Rome, il n'est pas rare de voir des matrones, dont le mari a été victime de la guerre ou de la maladie, élever seules leurs enfants. Toutefois, en temps normal, la famille romaine présente un autre visage.

La gens, le pater familias

Les liens familiaux sont très importants pour les romains, en particulier pour les patriciens La famille aristocra­tique (en latin gens, gentis, f., étymologiquement «ensemble de ceux qui sont apparentés») constitue un véritable clan. Une domus abrite en général toute la descen­dance du pater familias. Aussi n'est-il pas rare de voir cohabiter dans la même demeure le paterfamilias et sa femme, ses fils, leurs épouses, leurs enfants et même, dans cer­tains cas, les enfants de ces derniers! Le père de famille a donc souvent la joie de voir ses arrières petits-enfants jouer autour de lui.

Ce clan est uni par le culte des dieux domestiques: les Lares (Lares, um, m.), dieux de l'abondance, les Pénates (Penates, ium, m.), dieux du garde-manger, et les Mânes (Manes, ium, m.), esprits des ancêtres défunts. Un autel, appelé « laraire» (lararium,ii, n.), représente ces divinités dans l'atrium. Le père de famille est en même temps le prêtre de ce culte.

Le pater familias a tout pouvoir sur sa femme et sur ces enfants : c’est la patria potestas, puissance paternelle. Il peut refuser de reconnaître les enfants et les exposer à la naissance (c'est-à-dire les abandonner) ; il peut aussi les vendre, et même les mettre à mort. Devenus adultes, les enfants dépendent encore étroitement de leur père: ils ne peuvent se marier, quitter le domicile familial, posséder des biens ou signer un contrat sans son autorisation. Il garde sur eux l'autorité juridique, par exemple pour toute acquisi­tion de biens. Cependant, l'espérance de vie était très courte: peu de gens dépassaient l'âge de quarante ans. Le fils avait donc de bonnes chances de succéder rapidement à son père.

Quant à ses filles, elles quittent la domus au moment de leur mariage, ce qui arrive assez vite, puisque les Romains considèrent qu'à 12 ans les jeunes filles sont en âge de se marier.

Au cours des siècles de la République, la puissance paternelle s'affaiblit considérablement, et au temps de Cicéron, la famille ressemble beaucoup à ce que nous connaissons maintenant. Cependant, les sentiments familiaux restent empreints de religiosité: le mot pietas désigne le sentiment du devoir à la fois envers les dieux, envers la patrie, et envers les parents, et il peut se traduire par exemple, selon le contexte, par le mot « piété» ou par le mot « affection ».



Maîtres et esclaves réunis

Pour nous, la famille se compose des parents, des grands-parents, des frères, des sœurs... Bref, de ceux qui sont unis par un lien de parenté. Mais à Rome, il n'en va pas tout à fait de même: ce qu'un Romain appelle familia, c'est l'ensemble des personnes qui vivent sous un même toit et sous l'autorité du paterfamilias. Le mot familia vient de famulus, le serviteur, et désignait à l'ori­gine l'ensemble des esclaves.

Ainsi tous les esclaves, que ce soit le notarius (secrétaire du maître), la nutrix, le paedagogus ou l'omatrix (coiffeuse particulière de la matrone), font partie de la familia, comme l'épouse, les fils ou les filles du maître de maison. Bien sûr, ceux-ci n'ont pas, à ses yeux, la même importance que ses propres enfants; mais une maison sans aucun esclave lui paraîtrait bien vide, car un Romain ne peut pas se passer d'eux pour vivre au quotidien. D'ailleurs, au fil du temps, maîtres et esclaves finissent souvent par éprouver de l'affection les uns pour les autres.
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