Le théâtre

Les spectacles, à Rome, n'avaient pas grand chose à voir avec les représentations théâtrales dont nous avons l'habitude. Ils n'avaient pas lieu en soirée (comment les aurait-on éclairés?), mais dans la journée, et en plein air. Pendant longtemps, en effet, les pièces ont été jouées sur une simple estrade, dressée sur une place publique et démontée après le spectacle, tandis que les spectateurs s'asseyaient sur des gradins en bois ou restaient debout.

C'est seulement en 145 avant j.-c., plus de cinquante ans après les débuts du théâtre à Rome, qu'on y édifia un théâtre permanent, imité de ceux des Grecs, mais toujours construit en bois. Et il fallut attendre l'année 55 avant J.-C pour y voir enfin construire un théâtre en pierre sur le modèle d'un théâtre grec, par Pompée (le rival malheureux de César). II pouvait conte­nir vingt mille personnes. Deux autres allaient suivre pas davantage. Sous l'Empire, le théâtre connaît une évolution pro­fonde; il devient une sorte d'opéra à grand spec­tacle où dominent le chant, la danse et le mime. Il reste une des distractions favorites dans tous les pays romanisés. On compte plusieurs cen­taines de théâtres en Gaule, dont les plus célèbres sont ceux d'Orange, d'Arles, de Vienne, de Lyon.

Le théâtre romain se compose de trois parties:

1- la cavea :

c'est un demi-cercle de gradins ap­puyés sur une colline ou sur des murs épais. Une immense toile tendue (velum) protège les specta­teurs du soleil; pour la manœuvrer, on fait appel à des spécialistes: les matelots de la flotte






2- l'orchestre:
il est réservé aux personnages de haut rang et à leurs épouses qui viennent dans leurs plus beaux atours, « autant pour être vues que pour voir », dit le poète Ovide







3- la scène:

 
légèrement surélevée, elle est cou­verte d'un toit qui améliore l'acoustique. Sur le mur de fond de scène, percé de trois portes et décoré dans les étages supérieurs de colonnes de marbre et de statues, on applique des décors peints. Sous la scène, se trouve la machine avec laquelle le rideau est baissé au début de la repré­sentation et relevé à la fin. Les interprètes portent des masques, grotesques ou tragiques, et sont ha­billés soit à la grecque, soit à la romaine.

Des musiciens accompagnent certains passages du chant de la flûte. Le métier de comédien fut long­temps considéré comme dégradant, mais, sous l'Empire, les acteurs devinrent de véritables «ve­dettes» adorées par des foules de fanatiques prêts à se battre pour eux.

Les représentations théâtrales s'inséraient dans un programme officiel de « jeux» (ludi), offerts au peuple par un magistrat (préteur, édile, etc.), à l'occasion d'une des multiples fêtes religieuses qui scandaient la vie des Romains. On n'avait donc pas à payer sa place, et le public de ces spectacles gratuits était volontiers bruyant et passablement chahuteur. C'était le magistrat lui-même qui finançait ces spectacles, sur sa fortune personnelle - cela faisait partie de ses obligations.

Il s'adressait à un directeur de troupe (dux ou dominus gregis) ou, parfois, lançait un appel d'offre à plusieurs d'entre eux, qu'il mettait en concurrence. Le directeur retenu achetait alors à un auteur la pièce (tragédie ou comédie) qu'il souhaitait représenter, et il en assurait la mise en scène, avec l'aide d'un spécialiste, le «régisseur» (choragus), chargé des costumes et des décors (le plus souvent réduits aux façades de deux maisons, peintes sur des toiles tendues devant le mur du fond du théâtre).

Les auteurs, même les plus grands comme Nae­vius, Plaute, Térence, empruntent très souvent le sujet de leurs œuvres - comédies ou tragédies - au théâtre grec. Il existe pourtant un genre typique­ment latin, les atellanes, sortes de farces bur­lesques aux personnages conventionnels: le bossu au nez crochu et aux grandes oreilles, le vieux ra­doteur, le fanfaron, le goinfre, le rusé...

Les acteurs de théâtre étaient pour la plupart des esclaves, propriété du directeur de troupe. Jusque vers la fin du 1er siècle avant J.-c., ils se présentaient sur scène le visage maquillé et la tête coiffée d'une perruque, qui permettait au public de reconnaître chaque « rôle» au premier coup d'œil: elle était blanche pour les hom­mes âgés, blonde pour les jeunes gens, brune pour les adultes, rousse pour les esclaves.

Le costume était un autre élément d'identification immédiate: celui des vieux était blanc, celui des jeunes de couleur vive, et les esclaves portaient une tunique très courte, qui leur permettait de courir et de se démener sur la scène. Quant aux personnages féminins, leur robe était blanche s'il s'a­gissait d'une femme mariée, mais celle des femmes « de petite vertu» (type fréquent de la comédie) était très voyante, de couleur jaune safran.

Comme en Grèce, les rôles féminins étaient tenus par des hommes, dont le visage et les mains étaient simplement blanchis à la chaux, la peau blanche étant pour les Anciens l'apanage des dames. Quant au masque, qui symbolise pour nous le théâtre antique, c'était un accessoire grec, qui ne fut adopté à Rome que vers la fin de la République.

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